Témoignages

Nicole, ou la transmission du savoir

Nicole Croquison, 88 ans, avait le don de créer de jolies chose. L’une d’elles, c’est d’avoir lancé l’atelier de confection au Trait d’Union, dans les années 80.

De la couture…

C’est la douceur qui caractérise Nicole Croquison. Douceur dans la voix, dans les gestes. Elle marche lentement, à cause d’une chute récente, mais son esprit est vif. Elle nous reçoit dans son appartement, rue de Courtrai à Mouscron, pour nous parler de sa carrière. Née à Mouscron en 1934, de parents français, elle est à l’école au Tuquet dans les années 40. Sa passion, c’est la couture. « J’ai étudié la coupe et la couture jusqu’à 15 ans, puis je suis allée chez une couturière pour apprendre le métier. J’ai été couturière à mon compte, de mes 18 à 22 ans. » Nicole crée de tout, jusqu’aux robes de mariées. Indépendante, elle tiendra même une boutique de vêtements – « Imperméables, cuir et daim », précise-t-elle – dans la Petite rue.

…à la confection de housses de sièges

Son parcours prend une tournure différente dans les années 70. « J’ai répondu à une annonce. On cherchait une contredame, dans le cadre de la création de l’usine Nordvex, rue du Plavitout. C’est situé là où se trouvent aujourd’hui les ateliers communaux. Nordvex travaillait en sous-traitance pour Volvo, en Suède. Il y avait deux secteurs: celui de la mécanique, et celui de la confection de housses pour l’intérieur des voitures, le recouvrement des sièges. C’était ma première expérience dans une usine, et ça m’a beaucoup plu. »

Nicole doit se former à ce nouveau métier, en vue de mettre sur pied la chaîne de confection. « Je suis même allée en Suède, chez Volvo, pour m’initier à ce travail. Deux fois par an, nous allions également à l’usine de Gand, en présence de la direction suédoise, pour nous former aux nouveaux modèles, aux éventuelles modifications. On appelait ça « Volvo School ». C’est dans cette période que j’ai appris à me débrouiller en néerlandais, en anglais… J’avais des parents français, donc le néerlandais, ce n’était pas parlé à la maison! Mais j’ai trouvé ça intéressant! »

Licenciement

L’équipe est constituée d’une vingtaine de femmes, l’ambiance est bonne. « On s’entendait bien! Mais on n’avait pas beaucoup de temps pour discuter! Chacune était à sa machine, on travaillait ! » Malheureusement, l’aventure Nordvex s’achève en mai 1981… « La Suède a arrêté de faire appel à nous… Tout s’est arrêté, et ça a été le licenciement pour nous toutes. »

Photo : les collègues de chez Nordvex rendent visite à Nicole (en ensemble à carreaux) et sa fille, pour la naissance de son premier petit-fils.

Un rôle social

Nicole rebondit vite. Elle fera brièvement des démonstrations de fromages dans des grandes surfaces, avant de lancer une nouvelle chaîne de confection. Mais cette fois, dans un contexte très différent. « Je suis entrée au Trait d’Union en 1981. Là, c’est autre chose. Je travaille avec des personnes handicapées, des femmes. Beaucoup de jeunes filles aussi. J’ai dû leur apprendre le métier individuellement. Elles ne savaient pas piquer à la machine! Et il s’agissait de machines industrielles, pas de petites machines à coudre! Mais elles étaient motivées. »

La sauce prend. Nicole et son équipe créent des t-shirts, des sweat-shirts… Elles travaillent en sous-traitance pour l’entreprise Texim. « Il fallait avoir beaucoup de patience. C’est vrai que je devais souvent réexpliquer les mêmes choses, mais ces filles étaient de très bonnes personnes. Certaines vivaient dans des foyers, n’avaient pas eu la vie facile. L’une d’elles m’a dit ‘Nicole, tu es comme notre maman’. Il y avait un rôle beaucoup plus social que dans mon poste précédent. »

En 1994, à 60 ans, Nicole Croquison prend sa pension. Sans aucun regret, et avec beaucoup de bons souvenirs. Elle en parle avec émotion. « Je le referais. Rien ne m’a déplu. Les métiers étaient différents, mais ça me plaisait de travailler. »

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